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Textes sacrés

«Ce qui caractérise particulièrement les textes sacrés, c'est leur pouvoir d'inspiration. Lire les livres religieux constitue une discipline extrêmement efficace, qui tout en nous éduquant, éveille notre ferveur spirituelle. Les Écritures allument le feu de notre dévotion, nous donnent le courage d'intensifier nos efforts et nous font même sentir aussitôt plus près du Divin. Lire les exploits de Krishna s'avère parfois un tel délice spirituel qu'on se sent déjà tout proche de la libération. Méditer profondément sur un passage des Upanishads nous donne l'impression que la réalisation du Brahman est extrêmement accessible. La littérature sacrée agit comme un carburant qui nous permet de progresser de façon constante sur la voie spirituelle.»

Barbara Powell 

L'INDE SPIRITUELLE

«Il y a vingt-cinq siècles, l'Inde était déjà célèbre. Pendant que Babylone rivalisait avec Ninive pour la suprématie, que Tyr établissait ses colonies et qu'Athènes augmentait sa puissance, avant que Rome ne soit connue ou que la Grèce ne soit aux prises avec la Perse, avant que Cyrus n'ajoute du lustre à la monarchie perse, ou que Nabuchodonosor ne se soit emparé de Jérusalem... elle avait déjà acquis la grandeur sinon la gloire. » - M. A. Sherring (1868) 

La spiritualité imprègne tous les aspects de la culture de l'Inde, que ce soit la vie familiale et sociale ou la politique. Pour l'indien moyen, la religion est l'expression de la vérité universelle, le prolongement aussi profond que complexe de l'âme. La religion de l'Inde englobe tellement tout qu'elle absorbe ses fidèles de façon toute autre que les traditions religieuses d'Occident. Selon Peter Occhiogrosso, auteur à succès et spécialiste des religions comparées : 

Dans toute étude des religions du monde, l'Inde mérite une attention particulière. Selon un sondage Gallup récent, aucun autre pays n'a un pourcentage aussi élevé de personnes interrogées qui considèrent la religion comme «très importante» dans leur vie. Les États-Unis viennent en 2e position. Sur quelque 85o millions [maintenant 1 milliard] d'habitants, 68o [maintenant plus de 800] millions, c'est-à-dire 8o%, sont hindous. Les historiens reconnaissent que les plus anciennes civilisations ayant laissé des traces écrites ont prospéré presqu'à la même époque en Mésopotamie et dans la vallée de l'Indus (Inde du Nord). Mais, contrairement aux découvertes de la région de l'Indus, on ne retrouve en Mésopotamie aucune trace d'une religion mystique pratiquée par les Sumériens. Les plus anciens enseignements mystiques documentés au monde proviennent donc de l'Inde.¹

Les enseignements spirituels intemporels de l'Inde ont exercé un attrait sur des millions d'êtres, depuis l'ascète qui chemine sur les sentiers neigeux de l'Himalaya jusqu'au mendiant austère méditant sur les rives paisibles du Gange. 

LA RELIGION EN INDE

La majorité des gens en Inde sont hindous (terme impropre, comme l'expliquera la page suivante). L'hindouisme même est qualifié de «musée des religions», allusion au fait qu'on découvre sous ce nom générique plusieurs traditions distinctes : l'adoration de Vishnou (le vaishnavisme), le culte de la déesse (le shaktisme) ou de Shiva (le shivaïsme) et plusieurs autres cultes mineurs et sectes régionales. 

Ces religions virent le jour en Inde comme d'ailleurs plusieurs traditions ultérieures : le bouddhisme, le jaïnisme et le sikhisme (les deux premières datant de 2500 ans et la troisième du XVe siècle). Le bouddhisme et le jaïnisme professent surtout la moralité et l'éthique, spécialement l'ahimsa ou la non-violence envers tous les êtres vivants. Le sikhisme est un intéressant mélange de croyances hindoues et islamiques. L'Inde compte quelque six millions de bouddhistes, trois millions de jaïns et seize millions de sikhs.

Les religions «adoptées» de l'Inde - le zoroastrisme, l'islam, le christianisme et le judaïsme - ont aussi leur place dans son paysage spirituel. Le zoroastrisme, religion des parsis, est né dans la Perse antique. Son fondateur, Zarathoustra, mit l'accent sur la lutte opposant le bien au mal. On compte aujourd'hui en Inde quelque 85000 parsis.

Les leaders islamiques envahirent l'Inde au XIIe siècle. Avec un succès irrégulier au fil de nombreux siècles, les musulmans constituent de nos jours 11% de la population indienne. Ce qui fait de l'islam la plus grande religion minoritaire du pays.

Bien qu'on ait cru autrefois que le christianisme fut apporté en Inde par l'apôtre Thomas en l'an 52, plusieurs érudits estiment désormais que cette religion y fit son apparition au IVe siècle grâce à un marchand syrien nommé Thomas Cana, qui se rendit à Kerala avec 400 familles et y établit l'Indian Syrian Orthodox Church. Actuellement, on compte quelque 18 millions de chrétiens en Inde, dont la plupart habitent le Sud. La population juive de l'Inde est minime (25 000 en tout peut-être); on l'aperçoit surtout dans les régions où l'on parle le marathe et le malayalam.  

L' « HINDOUISME »

Notons ici qu'on ne retrouve aucune trace du terme «hindou» dans les textes ou les langues classiques — dont le sanskrit et le tamoul — de l'Inde antique. En fait, le mot «hindouisme» n'a aucune origine en Inde. Il n'en perdure pas moins et des traditions spirituelles aussi diverses que le vaishnavisme, le shivaïsme, le jaïnisme et le shaktisme en sont qualifiées. On peut l'employer par souci de commodité, mais en dernière analyse il s'avère inexact. 

Shri Shrimad A. C. Bhakti-vedanta Swami Prabhupada, fondateur et précepteur spirituel du Mouvement Hare Krishna, le considère comme un terme impropre: 

«En Inde autant qu'à l'étranger, les indiens s'imaginent parfois que notre mouvement se fait l'apôtre de l'hindouisme, mais il n'en est rien en vérité. On ne rencontrera pas une seule fois le mot «hindou» dans toute la Bhagavad-gita. En réalité, il fut introduit dans le langage courant par les musulmans des provinces voisines de l'Inde, dont l'Afghanistan, le Balouchistan et la Perse. Le fleuve marquant la frontière nord-ouest de l'Inde s'appelle le Sindhu (de nos jours l'Indus), mais à cause d'un défaut de prononciation, les musulmans de l'endroit en ont fait l'Hindu et les habitants des terres ainsi délimitées furent dès lors nommés hindous. » 

Cette explication de Prabhupada n'est pas une invention de sa part. De telles explications sont bien connues des érudits en matière de traditions de l'Inde. 
À titre d'exemple, Pandit Rajmani Tigunait abonde dans ce sens dans Seven Systems of Indian Philosophy: 

« L'usage populaire courant du terme hindouisme ne correspond pas à son sens originel. Quand Alexandre le Grand envahit le sous-continent vers 325 av. J.-C., il franchit le fleuve Sindhu qu'il renomma Indus pour en faciliter la prononciation par les Grecs. Les années macédoniennes d'Alexandre ont par la suite appelé le pays à l'est du fleuve, l'Inde. Plus tard, les envahisseurs musulmans renommèrent ce même fleuve Hindou car dans leur langue, le parsi, le son sanskrit s se change en h. Ainsi, Sindhu devint L'indu pour l'envahisseur et le pays à l'est du fleuve fut connu sous le nom d'Hindoustan. »

Ce concept est aussi exprimé par l'historien C. J. Fuller, qui souligne le fait que le mot «hindou» revêtait à l'origine un sens géographique, et non culturel ou religieux. De plus, il montre l'usage pratique de ce terme pour séparer les musulmans des autres peuples de l'Inde : 

«Le mot perse "hindou" vient de Sindhu, le nom sanskrit du fleuve Indus (situé aujourd'hui au Pakistan). Il désignait à l'origine un natif de l'Inde, le pays situé autour et au-delà de l'Indus. Quand le mot "hindou" (ou hindoo) entra dans la langue anglaise au XVII' siècle, il servait pareillement à dénommer tout natif de l'Hindoustan (Inde), mais vint graduellement à désigner une personne qui conservait la religion indigène au lieu de se convertir à l'islam. Servant à nommer cette religion indigène, le terme "hindouisme" devint courant en anglais au début du XIX' siècle et fut inventé pour identifier une idéologie qui était elle-même en partie le produit de la pensée orientaliste d'Occident, qui construisit (incorrectement) l'hindouisme d'après le modèle des religions occidentales, particulièrement le christianisme. En d'autres mots, l'hindouisme vint à être vu comme un système unique de doctrines, croyances et pratiques équivalentes à celles qui constituent le christianisme et désormais, le terme "hindou" spécifiait clairement l'affiliation religieuse d'un Indien.»

L'usage du terme global «hindouisme» pour désigner les nombreuses religions de l'Inde est comparable au fait d'ignorer les différentes orientations religieuses au sein des traditions occidentales, en les fusionnant arbitrairement sous une seule bannière (par exemple «le sémitisme» qui, comme «l'hindouisme», dénote simplement un site géographique). Judaïsme, christianisme et islam entre autres constituent les diverses traditions religieuses de l'Occident. De même que le terme sémitisme s'avère trop générique et réductionniste pour représenter correctement les manifestations religieuses uniques en leur genre des grandes traditions occidentales, et de même qu'il ne conviendrait pas de parler de toutes ces traditions comme d'une seule religion, le terme «hindouisme» est inadéquat. 

Ainsi le terme «hindouisme» est-il plus problématique encore que «hindou», car il sous-entend une forme unifiée de religion indienne qu'on pourrait aisément intégrer sous une bannière unique. Vu la variété de religions qui existent actuellement en Inde, comme le vaishnavisme et le shivaïsme, un seul terme ne peut guère convenir.